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Congé de formation : changer de voie sans perdre son emploi

Dans le cadre de sa mission confiée par le ministère du Travail, l’IGAS a étudié les pratiques de quelques États membres de l’Union européenne concernant la transition professionnelle des salariés, particulièrement les congés de formation. L’IGAS a analysé plus spécifiquement trois pays : l’Allemagne, l’Autriche et l’Espagne. Tous trois disposent, comme la France, de dispositifs permettant au salarié de suivre une formation. Cela avec des garanties (rémunération minimale ou indemnité, maintien de droits, retour à l’emploi à l’issue). Même si les modalités diffèrent sensiblement.

Dispositifs européens observés

Voici un survol des systèmes de chaque pays, selon l’analyse IGAS.

PaysDispositif(s) clé(s)Conditions d’accès / ancienneté / contraintesRémunération / indemnités / maintien des droitsDurée, ampleur, et nombre de bénéficiairesRetour à l’emploi / garanties de poste
EspagnePermiso Individual de Formación (PIF)Salarié justifiant au moins un an d’ancienneté chez l’employeur ; accord de l’employeur lorsqu’il y a un lien avec le poste ou non (PIF permet formation sans lien avec le poste).Fundae (la Fundación Estatal para la Formación en el Empleo) rembourse le salaire et les cotisations sociales associées, dans la limite du budget disponible.Faible usage : en 2022, environ 5 036 personnes ont bénéficié du PIF, soit 0,03 % de la population salariée ; durée moyenne de formation financée ≈ 71,7 heures.L’issue du congé permet au salarié de réintégrer son poste de départ.
AllemagnePlusieurs dispositifs, notamment le Bildungsurlaub (congé de formation) selon les Länder ; dispositif de promotion professionnelle pour formations longues (Aufstiegs-Bafög / Meister-Bafög) pour élévation de qualification.Ancienneté souvent exigée selon Länder ; certaines formations hors du temps de travail ; variabilité selon branche/Länder.Maintien de la rémunération pendant le Bildungsurlaub (salarié conserve salaire durant la période de congé formation) selon le Länder. Pour formations longues / promotionnelles, indemnités ou aides modérées selon cas.Dispositifs de formation de promotion professionnelle importants, avec durée longue possible (>1 an) dans certains cas. Le nombre de bénéficiaires est plus élevé qu’en Espagne ou qu’avec certains dispositifs français.Garantie de retour au poste initial après la formation, ou au moins d’un poste équivalent.
AutricheDispositifs de formation professionnelle continue longue durée, ciblant notamment les salariés avec qualification initiale faible ; initiative d’éducation des adultes ; dispositifs de congé / allocation / soutien pour formation.Ancienneté souvent requise selon le dispositif, ouverture parfois initialement pour salariés seniors mais de plus en plus utilisé par des plus jeunes.Indemnité ou allocation dans certains cas, mais le maintien intégral du salaire n’est pas toujours garanti pour tous les dispositifs. Certains congés de formation ne versent pas le salaire mais une allocation de l’assurance-chômage ou une compensation.Le nombre de bénéficiaires dans les dispositifs les plus importants atteint environ 0,4 % de la population salariée pour certains dispositifs de promotion professionnelle, ce qui est deux fois le niveau des effectifs inscrits dans les dispositifs Pro-A et PTP en France.Retour au poste initial garanti pour les dispositifs où le contrat de travail est suspendu ou où une garantie de retour est explicitement prévue.

Comparaison avec la France

Quelques traits saillants de la situation française :

  • La France dispose de dispositifs comme le Projet de Transition Professionnelle (PTP) (ancien Congé Individuel de Formation), Pro-A, TransCo.
  • Les dispositifs PTP et TransCo garantissent le maintien de la rémunération sous certaines conditions. Pendant la formation, le salarié conserve un niveau de revenu ou d’indemnité, mais le pourcentage de maintien et les plafonds varient selon la durée, le niveau de salaire, etc.
  • Le nombre de bénéficiaires en France reste modeste dans plusieurs de ces dispositifs. Le coût par personne de ces dispositifs reste élevé, ce qui pousse à s’interroger sur leur efficience et leur portée.

Forces, limites et défis des dispositifs européens

Forces

  1. Sécurité pour les salariés : garantie de retour à l’emploi initial, maintien ou indemnisation. Cela réduit le risque personnel associé à la reconversion ou formation.
  2. Possibilités de formation longue et promotionnelle : particulièrement en Allemagne et en Autriche, des dispositifs permettent d’accéder à des formations de longue durée, visant une montée en qualification.
  3. Rôle fort des partenaires sociaux et des structures régionales : dans la gouvernance des dispositifs (ex. Fundae en Espagne, administrations des Länder en Allemagne, etc.), ce qui peut aider à adapter aux besoins locaux.

Limites / obstacles

  1. Usage faible dans certains pays : même si le droit existe, peu de salariés l’utilisent (exemple de l’Espagne avec le PIF).
  2. Plafond budgétaire, capacité de financement : les dispositifs peuvent dépendre de crédits limités, donc conditionnés à la disponibilité de fonds (Espagne) ou à des cofinancements.
  3. Inéquité selon statut, niveau de qualification, taille de l’entreprise : certaines exigences d’ancienneté ou contraintes de branche/fédération peuvent exclure certains salariés.
  4. Complexité administrative / hétérogénéité : selon les Länder (Allemagne), selon les régions / branches (Autriche, Espagne), selon le dispositif. Ce qui peut rendre l’accès plus difficile.

Enseignements pour la France : pistes d’amélioration

D’après les comparaisons, voici quelques pistes que le rapport IGAS suggère, ou que l’on peut inférer :

  • Renforcer le recours aux dispositifs existants, via une meilleure information, simplification des procédures, accompagnement des salariés dans les transitions professionnelles.
  • Augmenter l’envergure des dispositifs, notamment pour les formations longues ou très qualifiantes, afin de permettre des élévations de qualification significatives.
  • Amélioration de la sécurisation financière, pour que le maintien des rémunérations ou indemnités soit plus systématique, avec des niveaux minimaux clairs, sans que le salarié prenne le risque d’une trop grande perte de revenus.
  • Harmonisation et fluidité : rendre plus homogènes les critères d’éligibilité, les durées, les conditions de retour au poste. Afin de réduire les inégalités territoriales ou selon l’entreprise/branche.
  • Contrôle et évaluation : suivre les résultats (nombre de bénéficiaires, reconversions effectives, coût-bénéfice) pour ajuster les dispositifs, identifier les filières peu mobilisées, etc.


Le congé de formation, ou plus largement les dispositifs de transition professionnelle, apparaissent comme des outils essentiels pour accompagner les mutations économiques, la reconversion des salariés, l’élévation des qualifications. Les pratiques observées en Allemagne, Autriche et Espagne montrent qu’il est possible de proposer un modèle combinant protection du salarié (rémunération ou indemnité garantie, retour au poste), flexibilité dans les modalités, variété dans les types de formations, tout en assurant un certain volume d’usage.

Pour la France, déjà bien dotée, les défis restent de taille. Etendre la portée des dispositifs, sécuriser financièrement les parcours, simplifier l’accès, et surtout veiller à ce que plus de salariés puissent effectivement en bénéficier. Sans que le coût ou la complexité ne soient des barrières.

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